En résumé :
Évolution des pratiques de restauration au XXe siècle
Les techniques et principes de restauration du patrimoine ont connu d’importantes modifications au cours du XXe siècle. Plusieurs documents clés ont été adoptés par la communauté internationale, notamment la « Charte de Venise » de 1964 pour la protection du patrimoine monumental et la « Convention de l’Unesco » en 1972 sur la préservation du patrimoine culturel, qui a été complétée par un autre texte en 2003 pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. Néanmoins, ces évolutions entrent parfois en conflit avec l’utilisation que font les populations locales de ces biens et la définition du concept d’authenticité.
La remise en question de l’authenticité
Le « dernier état connu »
Pour les architectes des bâtiments de France, la restauration doit se baser sur ce qu’on appelle le « dernier état connu ». Cependant, ce principe peut parfois être contredit par « une variété de critères et de situations », selon Adeline Rabaté, directrice de la Conservation des monuments et des collections au Centre des monuments nationaux. En effet, l’authenticité d’un lieu ne repose pas seulement sur sa valeur matérielle, mais aussi sur sa valeur symbolique.
Des exemples signifiants
Un exemple frappant est le pont de Mostar en Bosnie-Herzégovine, qui a été détruit en 1993. Ce pont, à la fois une pièce majeure du patrimoine bosniaque et un symbole de l’unité entre les diverses communautés de la ville, a été reconstruit à l’identique. Cependant, sa valeur symbolique s’est perdue, comme le témoigne Cécile Duvelle, consultante et ancienne responsable de la section du patrimoine culturel immatériel à l’Unesco.
Dans d’autres cas, des lieux non restaurés sont appropriés par les populations locales. C’est le cas en Afghanistan, où les Bouddhas de Bâmiyân, détruits par les talibans en 2001, n’ont pas été reconstruits, pour conserver le souvenir de cette destruction.
Le symbolisme des sites en Afrique
La restauration peut parfois entrer en conflit avec l’utilisation ou la dimension religieuse d’un lieu. C’est le cas des églises creusées de Lalibela en Éthiopie, qui sont en train de se dégrader lentement sous l’effet des intempéries. Ce patrimoine très spécifique repose sur le principe de laisser faire la nature, ce qui peut être considéré comme une limite déontologique de la restauration selon Régis Martin, président de la Compagnie des architectes en chef des monuments historiques.
La conservation-restauration, un aspect du patrimoine en soi
La Convention de l’Unesco de 2003 pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel a tenu compte de ces contradictions entre les règles de conservation et la dimension symbolique des sites. La convention considère certains types spécifiques de restauration, comme la rénovation septennale du toit du Kamablon au Mali, comme faisant partie intégrante du patrimoine culturel.
Reconnaissance internationale de la restauration et de la conservation
Les praticiens de la restauration et de la conservation cherchent à obtenir une reconnaissance internationale pour mettre en lumière des pratiques menacées, sensibiliser à leur viabilité et attirer les jeunes générations. Pour cela, ils peuvent recourir à des dispositifs nationaux comme le label « Entreprise du patrimoine vivant » et l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel.
Les Entretiens du patrimoine, trois jours de réflexion sur la conservation-restauration
Les Entretiens du patrimoine, interrompus depuis 2013, ont repris fin novembre dernier au musée du Quai Branly-Jacques Chirac. Organisés par la direction générale des patrimoines du ministère de la Culture, ils ont permis de réfléchir aux pratiques actuelles en matière de conservation et de restauration avec les différents acteurs du secteur.
👉 Vous utilisez Google News ? Ajoutez Culture Commune pour ne rien rater !